Je suis tombée sur son texte par hasard sur mon fil d’actualité Facebook l’an dernier. Puis une autre maman l’a partagé sur un groupe de parents dont je fais partie. Caroline Boudet, par ses mots, validait enfin tous les sentiments contradictoires que je vivais depuis la naissance de mon fils presque 4 ans auparavant.
Extrait du texte de Caroline Boudet:
Vous le savez peut-être/sûrement si vous lisez ce post. Il y a un peu plus de trois ans de cela, j’ai appris peu après la naissance de ma fille qu’elle avait une trisomie 21. Puis j’en ai parlé dans un post Facebook qui a « fait le tour du monde ». Puis j’en ai fait un livre. Puis j’ai eu droit à tous les superlatifs possibles. « Mère courage », « battante », « incarnation de la résilience », et j’en passe. Conte de fées, raconté comme cela, n’est-ce pas?
Et savez-vous ce qui se passait pendant ce temps-là? Au-delà des murs Facebook?
Pendant près d’un an, tous les jours, toutes les nuits avant de m’endormir, je revivais le moment où la pédiatre nous a annoncé le handicap de Louise. Je n’y « pensais pas. Je le revivais. Avec émotions à l’appui, cœur retourné, ventre serré; pensées qui s’emballent, en mode, « ça n’est pas possible, ça ne peut pas m’arriver, c’est une blague ». Bloquée. Chaque jour, encore, et encore.
Je me disais que c’était normal, et pas si grave. Après tout, c’était une sacrée embûche de la vie, mais pas non plus un bombardement en temps de guerre ou la perte de mon enfant, n’est-ce pas? Ça allait passer.
Le cho
Et puis un jour, j’ai appris qu’une amie avait accouché, dans des circonstances un peu compliquées. Dans la même maternité que celle où est née Louise. Sur le champ, j’ai ressenti une grande surexcitation – trop grande.
Il fallait qu’on aille la voir. Il fallait lui dire que ça allait bien se passer. Qu’elle avait toutes les chances.
Et puis boum. Quelques minutes plus tard, sous la douche. Un truc dont tu n’imagines pas qu’il puisse t’arriver. J’étais transportée dans le temps, dix mois plus tôt. Sous ma douche à la maternité, quand je venais d’apprendre la trisomie 21 de Louise. Les mêmes sensations, la même terreur, le même mal de ventre. Exactement comme si je revivais la même journée, dans ma chair
C’était terrifiant.
Petite présentation
Caroline Boudet est journaliste et auteure. En 2016, elle a d’ailleurs écrit un récit des 9 premiers mois de la vie de sa fille, Louise. Disponible chez Fayard, le livre s’intitule « La vie réserve des surprises ».
Pour le reste, donnons-nous la chance de la découvrir dans cette entrevue qu’elle a, si gentiment, accepté de m’accorder par courriel.
Si vous aviez à vous présenter en quelques mots, que diriez-vous?
Je suis Caroline, j’ai quelques dizaines d’années ?. Je suis journaliste, mais aussi (et davantage connue pour cela) la maman de Paul, 8 ans et Louise, 4 ans et porteuse de trisomie 21. Quand Louise avait 4 mois j’ai publié un coup de gueule sur Facebook, à propos des phrases que j’en avais assez d’entendre autour de sa trisomie, et il se trouve que ce post a fait un buzz mondial et complètement fou.
Que connaissiez-vous de la trisomie 21 avant la naissance de Louise?
Honnêtement, à peu près rien si je vous parle avec mon regard de maintenant. J’avais l’esprit plein de clichés que je pensais être des faits, mais en fin de compte je n’avais jamais réellement côtoyé de personne trisomique, ni échangé. Ma vie était loin du monde du handicap, et il faut avouer que ça m’arrangeait bien, car il me faisait peur, comme à énormément de gens.
Pour en savoir plus sur Caroline Boudet et sa fille Louise, ne manquez pas la deuxième partie de l’entrevue sur le blogue de Mamanbooh.
Comment son diagnostic vous a-t-il été annoncé?
Dès les premières minutes j’ai personnellement eu un doute en voyant les yeux de Louise. Cela a réveillé fortement mes angoisses autour du handicap. Cela me pesait trop lourd et j’en ai parlé à la pédiatre de la maternité. Louise, à part ses yeux, ne présentait pas de signe visible et habituel de la trisomie 21 (hypotonie, pli palmaire) mais la pédiatre m’a proposé de demandé un caryotype pour me rassurer. 24 heures plus tard, Louise avait un jour, la pédiatre est revenue avec les premiers résultats : il y avait bien une trisomie 21. Elle nous l’a annoncé avec calme et respect pour nos émotions.
Comment vos proches ont-ils réagit quand vous leur avez appris le diagnostic de votre fille?
Honnêtement, je ne sais pas. Tout s’est fait dans l’urgence, j’étais sous le choc et en véritable traumatisme. Nous avons prévenu nos proches rapidement, mais aussi par SMS ou messagerie. J’étais moi-même trop terrassée par mes propres émotions pour être capable d’entendre celles des autres, clairement. Mais tous ont été d’un soutien extraordinaire car ils nous ont dit ou envoyé, grosso modo, ce message : « Ça va aller, c’est dur pour le moment, nous sommes avec vous, ne vous en faites pas ». Tout ce qu’on a besoin d’entendre dans ces moments-là.
Qu’est-ce que la naissance de Louise a changé à votre vision de la maternité?
Sa naissance m’a appris que la grande leçon de la maternité, c’est qu’on a beau croire qu’on maîtrise tout grâce à la science, ce n’est pas le cas. Être parent, c’est la vie, et la vie gardera toujours une part d’imprévu. Comme le handicap inattendu d’un enfant ! Accepter d’être mère ou parent d’ailleurs, car ça vaut pour le père, c’est accepter qu’on aimera son enfant même s’il n’est pas « comme prévu » et qu’il débarque avec son lot de surprises.
Que trouvez-vous le plus difficile dans la vie avec un enfant vivant avec des besoins particuliers?
Question facile! Le plus difficile, ce sont les démarches administratives et d’avoir l’impression de sans cesse se justifier ou se battre pour que les droits de son enfant soient respectés. Rien n’est encore « naturel » dans notre société pour les personnes avec handicap, il faut batailler pour beaucoup de choses. C’est épuisant.
Pour connaître la suite de cette entrevue, je vous invite à aller sur le blogue de Mamanbooh. Caroline Boudet continue à y parler du beau et du moins beau qui viennent avec la naissance d’un enfant différent, dans un système qui n’est pas toujours prêt à aider. Sa façon d’exprimer les choses simplement, avec une touche d’humour, mais sans tabous viennent me rejoindre totalement.
Propos de Caroline Boudet recueillis par courriel.
Pour en savoir plus sur Caroline Boudet et sa fille
- Son blogue sur Huffinton Post
- Extra Louise la page, Instagram et Facebook
- Sa page Facebook professionnelle
- Une entrevue avec Geneviève Labrèque, Directrice du Regroupement pour la trisomie 21 et maman d’Hubert
Laisser un commentaire