Si j’avais à faire un résumé de toutes les phrases que j’ai entendues depuis que mes enfants sont nés, ça ressemblerait à ce que j’ai écrit ici. Aujourd’hui, je veux vous parler de courage. Ouais. T’é donc ben courageuse!
D’abord, je ne me sens pas du tout courageuse.
Je vis très mal avec le fait de me faire dire ça.
Ça me génère beaucoup d’anxiété.
Je ne me sens pas à la hauteur de ce terme.
C’est moi qui ai un problème avec ça. Mais honnêtement, je vais vous le dire, si je me sens pas courageuse, c’est probablement parce que je ne me suis pas lancée sur cette mission-là, moi, d’avoir 3 garçons dont deux avec diagnostics. Des jours je me dis que je me serais bien contentée d’une petite vie de banlieue avec des enfants neurotypiques, ça aurait peut-être été plus facile. Mais je les ai mes 3 petits cocos et je les aime. Je ne les retournerai pas à l’usine, mon cœur ne prendrait pas le choc. Bref, la mission de l’atypicité, je ne me la suis pas lancée, elle est venue me chercher. C’est de même, c’est ma vie. Y’a pas vraiment de courage la-dedans.
Le syndrome de l’imposteur dans toute sa splendeur!
Non seulement je ne me sens pas courageuse, mais des fois, je me sens même incompétente! Je ne me sens pas à la hauteur. Ça m’arrive.
Par exemple, le 25 août, c’était la course Trois, 2, 1, Go! pour le Regroupement pour la Trisomie 21.
Ça me tient à cœur cette course-là. Je voulais y aller.
Pas dadon du tout, mon époux était en Saskatchewan pour le travail ce weekend-là. Même si je le savais d’avance, même si je m’étais vraiment préparée à l’événement, y aller seule avec trois enfants, ça me virait complètement à l’envers.
J’ai fait deux crises de panique à la maison le matin même.
Je me sentais encore plus poche parce que j’allais avoir de la misère à socialiser avec les autres parents présents sur place. Des parents que je voyais tellement meilleurs que moi avec leurs chandails à l’effigie de leur enfant et leur équipe d’accompagnants. Moi, j’étais là, avec mes trois cocos, dont deux dans une poussette, je les nourrissais de Ficello et de Gold Fish pour les tenir tranquilles en attendant la course. Disons que quand j’ai vu mon amie arriver avec sa famille, j’ai eu envie de pleurer de joie.
Le courage, c’est ben relatif! Je me sens beaucoup plus comme le lion poltron du magicien d’Oz que comme une personne courageuse.
La notion de choix
C’est bizarre comme dans ma tête, la définition de la notion de choix est bien personnelle.
Ma perception
Quand mon coco est né avec son petit chromosome de plus. Je ressassais continuellement dans ma tête le fait que je n’avais pas eu « le choix » de vivre avec ça, parce qu’il nous avait fait la surprise de son état. J’avais l’impression d’avoir été bernée par la science et les probabilités et que de l’avoir su avant la naissance, qu’on le garde ou non aurait été un choix.
Et son contraire
À un certain moment, j’ai eu une discussion avec une autre mère, qui m’a beaucoup troublée.
Nous étions ensemble dans un groupe de stimulation et elle me parlait d’une conversation qu’elle avait eue.
Elle, elle avait su avant la naissance que sa fille allait naitre avec la trisomie 21.
Elle s’était fait dire qu’elle, elle avait eu le choix, ça l’avait fâchée (et c’était pas moi qui lui avait dit ça! Ouf!). De son côté, quand elle avait choisi d’avoir un enfant, elle le prenait comme il était. Ce qui arrivait après la conception, ça faisait partie de son enfant et elle devait l’accepter. Donc pour elle, il n’y avait aucune notion de choix à part le fait de choisir d’avoir un enfant.
J’ai écouté son point de vue. Je n’étais pas totalement d’accord, mais c’était censé. Même si c’était très différent de ma perception, je ne pouvais rien ajouter à ses arguments, ce n’était pas nécessaire. Elle avait une opinion définie et très logique, j’avais la mienne. Il n’y avait pas de point de vue meilleur qu’un autre à mes yeux. Ce n’était donc pas un débat.
Je me suis ensuite questionnée encore sur la notion de courage. Elle, elle avait fait le choix de l’enfant, peu importe sa condition. Moi, j’avais l’impression de m’être fait imposer quelque chose.
Sa façon paisible de prendre la nouvelle me démontrait que j’étais loin d’avoir son courage.
Encore une fois, je me sentais lâche d’avoir pensé avoir ressenti toute ces émotions négatives suite à la naissance de mon enfant.
Un autre exemple de choix
Té donc ben courageuse de passer toutes tes semaines seule avec tes enfants! 3 gars en plus!
Mon chum travaille loin. Il travaille beaucoup. Ça fait partie de notre vie.
Quand je l’ai choisi, c’était déjà comme ça. Il avait déjà des contrats un peu partout. Ça n’a pas changé parce que nous avons eu des enfants.
On a déjà eu des conversations là-dessus lui et moi. On s’est demandé s’il devrait travailler pour des compagnies « en ville ». Mais ce genre d’emploi lui demanderait de rester dans un bureau et de faire de la paperasse, toute la journée. Ce serait la fin de notre couple. Il serait tellement malheureux de faire ce genre de travail que notre couple en souffrirait, c’est sûr.
Au lieu de ça, il a un emploi qu’il aime, avec des projets qui le stimulent. Il est vraiment sur son X. Mais ça implique qu’il travaille loin, parce qu’il n’y a pas de projets du genre près de la maison. Il travaille sur des chantiers d’envergure. Il y en a bien eu quelques-uns à Montréal dans les dernières années, mais pas présentement, pas dans son créneau.
Quand je parle avec d’autres gens, le mot courage revient vraiment souvent. Mais je ne le vois pas comme ça. Je vois juste ça comme étant « normal » de laisser mon homme vivre ses passions et faire le travail qu’il aime. Je trouve ça normal comme rythme de vie parce que c’est le nôtre.
On peut dire qu’on a un peu choisi ce style de vie, mais pas vraiment. Il venait avec lui. Ça faisait partie du package quand j’ai décidé d’avoir des enfants avec lui.
Est-ce que ça rend les choses plus faciles? Non. Est-ce que ça me rend courageuse? Euh… Non!
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