J’ai enfin eu un petit moment à moi ce soir. Quelques minutes où j’avais assez d’énergie pour rester éveillée et laisser mes pensées vagabonder. C’est drôle comme c’est inspirant de regarder le plafond des fois. J’ai laissé mes idées mener le bal et s’entremêler. Il y avait des histoires d’inondations, d’empathie, de bienveillance, de jugement, du fait d’assumer des choses et d’anxiété qui s’entremêlaient. J’ai eu envie d’en faire un billet.
J’espère que ça sera assez sensé pour le publier, il me semble que pour moi ça a un certain fondement.
Prémices
J’ai fait une lecture récemment. Je ne me rappelle plus c’était où exactement par contre, ou dans quel livre. D’ailleurs, si vous savez de quoi je parle, j’apprécierais beaucoup que vous me donniez la référence en commentaire.
Bref, j’ai lu quelque part qu’on ne pouvait pas assumer les émotions des autres par le ressenti que nous même on aurait dans les mêmes circonstances.
Exemple : j’en ai parlé très souvent, j’ai vécu un choc post-traumatique suite au diagnostic de mon deuxième. J’ai également fait une dépression sévère et je vis avec un trouble d’anxiété généralisé.
De par mon vécu, il est facile pour moi d’assumer que tous les gens apprenant le diagnostic d’un enfant trouvent ça difficile et que minimalement, ça lui prendra un certain temps à s’en remettre. Mais supposons que quelqu’un me dit qu’il vient de recevoir un diagnostic pour son enfant.
Est-ce que je peux réellement savoir comment il vit avec cette nouvelle? Peut-être que c’était quelque chose à quoi il s’attendait, peut-être qu’il connait bien la situation, peut-être qu’il était déjà prêt à vivre avec un enfant ayant ce diagnostic à cause d’un historique familial. Je n’en sais absolument rien.
Face à cette situation, comment est-ce que je poursuis la conversation?
C’est là que mes réflexions se portent. Comment est-ce qu’on aborde quelqu’un par rapport à son vécu? Comment peut-on lui parler sans assumer quoi que ce soit?
Ne rien assumer
Assumer, c’est de poser un certain jugement sur le vécu de la personne sans connaitre tous les détails. C’est prendre notre vécu, notre ressenti, nos émotions et le transposer à quelqu’un d’autre qui n’a pas du tout les mêmes balises, le même bagage, que nous.
Quand on chemine dans la vie, on se crée un genre de filtre pour voir les événements qui surviennent. Ce filtre se construit selon notre personnalité, mais dépend aussi de la somme de toutes nos expériences de vie, de notre niveau de fatigue et de la quantité de neige (des fois, ça dépend). Chacun a donc un filtre pour voir ce qui survient, tant à lui qu’aux autres. Une situation peut donc sembler totalement catastrophique à quelqu’un alors que pour un autre individu qui est face à la même situation exactement, ça peut être une simple embuche. Assumer que l’autre perçoit lui aussi la situation comme une catastrophe devient donc un jugement. Et aborder la personne en lui disant : « Oh mon dieu! Tu dois être dévasté! » peut créer un certain malaise.
Oui, mais l’empathie?
Évidement, mon cerveau ne pouvait pas arrêter là, bien sûr.
Si on fait face à quelqu’un qui vit une situation difficile, ne serait-il pas normal de lui démontrer qu’on est là pour le supporter? Tout à fait. Mais sans porter de jugement ni assumer quoi que ce soit. Alors comment?
Est-ce que de dire : « Tu dois être dévasté! » à quelqu’un est une marque de support? Bien sûr que non. C’est une réflexion. C’est la démonstration de comment, nous-mêmes, on se sentirait si on vivait la même situation, selon le filtre qui teinte notre réflexion à ce moment-là. Aussi bien dire : « Oh mon dieu! Je serais dévastée! » mais après? On dit quoi?
On demande! Tout simplement.
Questionner
Et si au lieu d’assumer, de juger en fonction de nos propres lunettes teintées, on prenait le temps de réellement questionner.
« Oh mon dieu! Je serais dévastée! Comment te sens-tu? » C’est déjà mieux, non? Mais réellement, si on voulait réellement démontrer de l’intérêt à notre interlocuteur, si on s’enlevait carrément de l’équation? Si on s’oubliait un instant pour laisser totalement la place à l’autre?
« Comment te sens-tu? » Une question toute simple, 4 mots, sans aucun à priori, qui laisse toute la place à l’autre de s’ouvrir sur ses propres émotions, son propre ressenti. N’est-ce pas ça la réelle empathie? On pense que l’autre peut souffrir, on s’imagine que la situation le bouleverse, mais on lui laisse pleinement l’opportunité de l’exprimer lui-même, dans ses propres mots. Il sera toujours temps de voir ensuite ce qu’on peut faire pour le soutenir, s’il en exprime le besoin.
Si on arrêtait de mettre des mots dans la bouche des gens et qu’on prenait réellement le temps de les écouter.
C’est évident que toutes les situations ne sont pas les mêmes et que si on voit quelqu’un qui est réellement en détresse, c’est parfois possible de tirer certaines conclusions. Mais en prenant le temps de questionner la personne avant de mettre des mots dans sa bouche, on peut aussi l’aider à cheminer plus aisément.
« J’ai l’impression que tu ne vas pas bien. Est-ce que tu veux m’expliquer ce qui se passe? »
C’est tout aussi valide pour les enfants.
La personne se sentira plus facilement en confiance, elle saura qu’il y a quelqu’un qui est prêt à accueillir ce qu’elle a à dire et déjà, ça peut lui faire du bien, de ne pas se sentir seule avec la situation.
Finalement, poser des questions, ce serait peut-être ça faire réellement preuve d’empathie. Qu’est-ce que vous en pensez?
Attention! Faire preuve d’empathie est quelque chose d’extrêmement important. Se mettre à la place de l’autre, être à son écoute, prendre conscience de ses émotions. Mon billet se veut une réflexion sur la façon dont j’ai spontanément tendance à assumer que la personne aura des sentiments anxieux. Je reviens d’ailleurs sur le mot « inondations » que j’ai mentionné en introduction. J’ai vu des images où des gens devaient évacuer à cause de la crue des eaux. Je sais que j’aurais sûrement paniqué face à une telle situation. Mon anxiété aurait pris le dessus. De voir que des gens puissent réagir calmement face à un tel phénomène naturel a dépassé ce que j’étais en mesure de comprendre. À ce moment-là, je ne peux pas me mettre à la place de l’autre, mais simplement observer.
[…] J’ai eu beau lui parler de ma situation, du temps que ça a pris pour que les médicaments fassent effet, pour que la psychothérapie m’aide à m’orienter vers les bonnes pistes pour m’en sortir et tout le reste. Pour lui, c’était trop abstrait pour qu’il puisse être empathique. […]