Ces dernières années, on parle de plus en plus d’authenticité, de vulnérabilité comme des actes de courage. On félicite les humains qui s’ouvrent sur les réseaux sociaux à propos de leurs défis et on célèbre leur authenticité quand ils dévoilent leurs émotions au grand public.
Je dis qu’on les félicite, mais ce n’est pas le cas de tout le monde. Certains voient cette ouverture comme une quête de sympathie ou même de l’exhibitionnisme.
Je ne peux pas dire que je sois d’accord avec ces derniers.
Dans mes moments les plus difficiles de ma vie, je cherchais désespérément des repères, des modèles, des gens qui vivaient la même chose que moi, pas nécessairement dans leur quotidien, mais dans leurs émotions, et je n’en ai pas trouvé.
De voir les autres être si « forts » me faisait sentir encore plus inadéquate. J’avais réellement besoin que des gens valident que les émotions que je ressentais étaient « normales » et j’avais aussi besoin de sentir que d’autres avaient traversé la même chose que moi.
Et j’ai décidé de devenir cet humain
Je commençais à me porter mieux. J’étais sortie des profondeurs des abysses et je remontais tranquillement pour reprendre mon souffle. Je me sentais plus forte et j’ai commencé à nommer mes émotions sur le blogue. D’abord sans trop d’attentes, mais toujours avec l’idée de faire une différence. Pour moi, c’était l’opportunité de donner un sens à ce que je venais de traverser.
J’étais loin de l’idée de m’exhiber.
Je voulais montrer à d’autres humains que leurs émotions étaient là pour une raison et qu’un jour, ça les transformerait.
La vulnérabilité : s’ouvrir quand on est guérie?
Dans son livre Daring Greatly, Brené Brown mentionnait que, selon elle, exprimer sa vulnérabilité, c’était de s’ouvrir, oui, mais pas n’importe comment. C’était de prendre le temps de digérer l’émotion, de la traverser complètement pour mieux la transmettre aux autres. Elle n’encourageait pas le fait d’être un livre ouvert (« oversharing »), mais plutôt de parler de nos vécus à des moments appropriés, dans une certaine mesure.
Même si j’ai énormément apprécié son livre, je ne suis pas entièrement d’accord avec tout ce qu’elle y dit.
Dans mon cheminement personnel, le fait de nommer, sur le blogue, des émotions qui m’habitaient encore ou qui étaient fraichement vécues, c’était l’occasion de m’en libérer. Ça été aussi l’opportunité d’offrir des textes plus « vrais » sur ce que je vivais, plutôt que de nommer, de façon posée et mesurée des émotions lointaines.
En le faisant, au moment où je l’ai fait, j’accordais une énorme importance à ces mots, parce qu’ils étaient ceux qui avaient le plus de chances de toucher les bonnes personnes, celles qui en avaient réellement besoin.
Le chemin n’est pas terminé
Force est de constater que j’ai encore un long bout de chemin à faire avant d’être totalement libérée de mon passé.
Je vis encore des fragilités liées à mon anxiété et mes dépressions.
Mes limites sont moins grandes que celles que j’avais auparavant.
Lorsque j’ai fait ma première dépression, j’avais déjà accumulé beaucoup de stress dans les années précédentes. J’avais été trop forte, trop longtemps, et c’est sorti un peu de travers.
Je suis retombée sur mes pieds, pensant que j’étais la même femme qu’avant. J’ai recommencé à vivre la vie comme je l’avais toujours vécue. Tout semblait bien aller, jusqu’au jour où ça n’allait plus.
J’ai réalisé ce jour-là que j’avais mis beaucoup moins de temps à me sentir débordée. Pourtant, j’ai voulu continuer en faisant comme si tout allait bien. Et je me suis complètement écroulée.
Aujourd’hui, au moment d’écrire ces lignes, je me sens particulièrement fragile. Pourtant, ça ne fait pas si longtemps que je suis « guérie » de ma dernière dépression. Quand je m’auto-examine, je ne crois pas que j’y sois retombée non plus, mais mon corps me dit que c’est assez. Je sens que j’ai poussé mes limites un peu trop.
Aujourd’hui, je suis en mesure de détecter les signes qui viennent avant l’explosion. J’arrive à sentir ce dont je manque. J’ai aussi les outils qui me permettent d’aller mieux et d’avancer.
Aujourd’hui, je pense que d’être forte, c’est d’arriver à reconnaitre ma fragilité. C’est aussi arriver à nommer mes défis, à les accepter et à les affronter. Je pense que ma force c’est d’arriver à détecter tout ça et intervenir, en allant chercher l’aide nécessaire avant qu’il soit trop tard.
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