Je l’ai souvent dit, les réseaux sociaux sont précieux dans ma vie. Ils m’ont permis de faire la connaissance de gens fantastiques. Il y a des gens avec qui ça connecte instantanément. Les schémas de pensées sont similaires ou complémentaires, ça coule bien. C’est ce qui est arrivé avec Larissa.
Nos chemins se sont croisés sur LinkedIn, un réseau pourtant réputé pour sa froideur. Toutes deux avions des visions similaires en plusieurs points. Puis nous sommes allées bruncher. La connexion était bien là, même en personne. Tellement, que je lui ai spontanément proposé de faire une entrevue avec elle, pour vous la présenter.
Je suis vraiment touchée qu’elle accepte, par courriel, de partager un peu d’elle. La voici donc.
Larissa Jean-Baptiste, multipotentielle-relationnelle
D’abord, bonjour. J’ai envie de commencer avec une question toute simple. Pourrais-tu te présenter en quelques mots? (Là je ris en écrivant la question parce que Larissa parle beaucoup. Quelques mots, ça risque d’être plutôt difficile, surtout avec son parcours. Voyons ce qu’elle a à dire.)
Et là, je ris aussi du commentaire sur le fait que je parle beaucoup. Un rire mitigé. Parce que j’ai vécu 90% de ma vie en étant silencieuse et invisible. Alors, libérer ma voix et mon talent de communicatrice est un des plus beaux cadeaux que je suis en train de m’offrir.
Qui je suis? Une question que j’aime parce que la plupart des gens répondent en parlant de ce qu’ils font au lieu de dire qui ils sont.
Je peux dire que je suis avant tout une multipotentielle-relationnelle douée de beaucoup d’empathie, d’altruisme, de bienveillance et de résilience. Les gens autour de moi disent que je suis à la fois pétillante et apaisante.
Ce que je fais? Maman de 3 filles. J’enseigne la Zumba. J’ai co-créé, avec Yasmina Benmira, ConnexionTalents. Après tout un parcours en psychologie / intervention psychosociale / création et animation de formations dans différents domaines liés à la psychologie humaine.
Une de mes passions est de questionner les mythes et paradigmes courants.
Ton parcours est rempli de péripéties, d’événements marquants, de défis, de traumas, et de changements. En quoi ta compagnie, ConnexionTalents fait le pont entre tout ça?
Question intéressante!
Si j’avais à définir ConnexionTalents aujourd’hui avec le moins de mots possibles, ce serait « ancrage et empowerment ».
ConnnexionTalents se spécialise dans la connaissance de soi et des autres pour plus d’empowerment dans la vie professionnelle et personnelle. Nous sommes des ambassadrices des concepts d’unicité et de zone d’excellence.
La connaissance de soi permet de me voir et d’aider d’autres personnes à se voir au-delà de leurs péripéties, traumas ou défis. C’est comme la possibilité de voir qui on est quand on est « tout nu ».
Notre noyau, notre essence, notre vrai identité.
Je pense que notre noyau en tant que personne est ce qu’il nous reste à travers tout, envers et contre tout. Ce qu’on amène partout avec nous.
Et c’est ça, pour moi, le pont entre tout.
Larissa Jean-Baptiste sur Facebook
Résilience et unicité
On comprend rapidement que la résilience est une de tes grandes forces. Si tu avais à définir la résilience, comment le ferais-tu?
Dans la simplicité, je dirais que c’est « la capacité à passer au travers et à s’en sortir ».
Un désir brûlant d’y arriver mélangé à une capacité à le faire.
La capacité à activer nos ressources pour se relever à travers les péripéties, les défis et les traumas.
Une capacité qui résulte d’un mélange de génétique, d’amour et d’environnement.
Tout un sujet dont nous pourrions parler des heures et des heures.
Boris Cyrulnik est probablement un de mes auteurs clé en termes de résilience.
Une des façons de prendre soin de moi est de m’assurer que j’ai du plaisir régulièrement. Que je m’amuse. Parce qu’avec mon profil (qui je suis), j’en ai besoin.
J’ai aussi besoin d’apprendre, d’évoluer, de travailler, d’interagir… et de danser. – Larissa Jean-Baptiste
Les mots « atypique » et « unicité » reviennent souvent au cours de nos discussions. Qu’est-ce qui rend ta famille unique?
Elle est intense ma petite famille!
Je pense que chaque famille est unique en son genre. J’aime beaucoup le concept de « culture familiale ».
Les mots « TDAH, dyslexie, douance, hypersensibilité, multi-potentialité, anxiété, stress de performance, stress post-traumatique…. » font partie des caractéristiques qui font que je dis que ma famille est atypique.
Au-delà de ces mots, il y a aussi le fait que nous sommes des « immigrants, très ouverts d’esprit, relationnels et pleins de vie ». Chez nous, ça rit beaucoup, parle beaucoup, met de la musique et danse tous les jours. Ça se chicane et ça pleure aussi tout autant.
Offrir le choix et s’ouvrir à l’autre
Au cours de nos discussions, j’ai compris que vous aviez fait le choix de la déscolarisation, pendant 6 ans. Qu’est-ce qui vous a amené à faire ce choix? Et pourquoi le retour vers l’école pour tes filles? Comment ça s’est passé?
J’avais envie que mes filles sachent qu’elles ont le choix dans la vie. Surtout, le choix d’aller à leur rythme, d’apprendre à leur façon, de connaître et respecter leurs besoins spécifiques.
J’avais aussi envie de consolider leur créativité, leur esprit critique et leur estime d’elles-mêmes.
Je ne voulais pas qu’elle confonde leur identité réelle avec leurs défis et diagnostics.
Ce n’était pas vraiment une question d’école ou pas école. C’était surtout une question de rester à l’écoute des besoins de mes enfants et de notre famille.
Et… j’aime explorer et expérimenter dans la vie!
Le retour à l’école? J’avais accompli ma mission. Je sentais qu’elles avaient intégré ce que je considère être une base solide. Notre petite famille était passée à une autre étape avec d’autres besoins.
Dans ce beau mélange de diagnostics, lequel représente le plus grand défi à tes yeux? Pourquoi?
En fait, le plus grand défi à mes yeux s’appelle « stigmatisation ».
Le stigma lié à tout ce qui est lié à la « santé mentale ». Je mets entre «…» parce que je pense que santé mentale = santé physique. Nous sommes un corps, le cerveau est juste un des organes du corps et tous nos organes sont liés entre eux.
Donc, la stigmatisation liée au TDAH, à la douance ou à l’anxiété… me frustre et me brise le cœur profondément.
À mon sens, si on pouvait en parler ouvertement et ne pas se faire dire :
- « mais le TDAH n’existe pas pour vrai »
- ou « pour qui tu te prends de dire que tes enfants sont à haut potentiel, tout le monde est intelligent, voyons »
- ou « pourquoi tu veux mettre des étiquettes sur tes enfants »
Si j’avais une baguette magique, j’enlèverais l’ignorance et la stigmatisation liées à tout ça. Ce serait tellement plus facile.
Ce serait surtout moins souffrant. Parce que rien n’est plus souffrant que de vivre en silence et dans l’isolement affectif cette douleur invisible, incomprise et déclencheur de jugements de la part des autres.
C’est définitivement une cause qui me tient à cœur et à laquelle j’aimerais contribuer davantage.
Une famille unie et atypique
La vie de famille ressemble à quoi pour vous? Comment se vit le lien entre tes filles? Le quotidien?
Pas toujours évident ça!
Et j’imagine que ça se vit un peu comme dans toutes les familles, avec des hauts et des bas, des moments de grand rapprochement suivis de conflits.
L’hypersensibilité est tout un défi quand on parle de liens. Ça diminue souvent le niveau de tolérance.
Se faire toucher par sa sœur peut se transformer en colère explosive.
Entendre la petite pleurer peut irriter la grande au maximum.
Les crises à répétition finissent par atteindre le système nerveux qu’on le veuille ou non.
Nous faisons de notre mieux et je les nourris de tout plein de câlins.
Et le beau. Qu’est-ce que vos différences vous apportent de beau? Pour toi? Pour ta famille?
Justement, la tolérance face aux différences.
C’est essentiel pour moi que mes filles soient conscientes de qui elles sont. Qu’elles acceptent autant leurs défis, leurs limitations, leurs « diagnostics » que leurs talents innés.
Par exemple, ma grande a rassuré sa nouvelle prof de français à l’école face à sa dysorthogaphie, en lui disant quelque chose qui ressemblait à « ne vous en faites pas, madame…, je suis dyslexique, je fais de la dysorthographie. C’est ce qui explique mes nombreuses fautes dans le texte. Tout va bien aller. »
Je suis très fière de ces moments-là ou des moments où elle me raconte qu’elle « éduque » ses amis sur le TDAH en leur expliquant comment fonctionne le cortex préfrontal du cerveau.
Pour rester dans le thème du beau. Quelles sont les plus grandes qualités de tes filles? Celle qui les rends vraiment spéciales à tes yeux?
Leur maturité et leur unicité.
J’adore les conversations que je peux avoir avec elles.
Leur esprit critique qui fait qu’elles sont capables de questionner ce qu’elles entendent autour d’elles.
Leur capacité à nommer ce qui se passe pour elles, en elles.
Nommer leurs ressentis et leurs besoins. C’est essentiel aussi à mes yeux.
Et elles aiment danser! C’est précieux.
Qui je suis? Une question que j’aime parce que la plupart des gens répondent en parlant de ce qu’ils font au lieu de dire qui ils sont.
Je peux dire que je suis avant tout une multipotentielle-relationnelle douée de beaucoup d’empathie, d’altruisme, de bienveillance et de résilience. Les gens autour de moi disent que je suis à la fois pétillante et apaisante. – Larissa Jean-Baptiste
Danser sa vie
Avant d’être une maman, tu étais une femme. Est-ce que tu prends le temps de prendre soin de toi au quotidien? Comment?
Oui ! À ma façon.
Je ne suis pas certaine que ce soit toujours une question de temps.
Je pense que c’est avant tout une question de se connaître pour adapter sa vie à ses besoins, désirs et envies.
Une des façons de prendre soin de moi est de m’assurer que j’ai du plaisir régulièrement. Que je m’amuse. Parce qu’avec mon profil (qui je suis), j’en ai besoin.
J’ai aussi besoin d’apprendre, d’évoluer, de travailler, d’interagir… et de danser.
Je suis une multipotentielle, alors je fais plein de choses chaque jour !
J’ai aussi besoin de calme. Alors parfois je m’enferme dans ma petite bulle, je vais m’asseoir à côté du fleuve ou j’écris dans mon journal intime en faisant des respirations profondes.
Et si je te laissais le mot de la fin?
J’ai envie de te remercier, Karine.
Et de te reconnaître.
Merci d’avoir accepté mon invitation à bruncher. Merci de me donner l’opportunité de m’exprimer ici sur ton blogue.
Te reconnaître pour tout ce que tu incarnes et que tu partages avec d’autres mamans comme moi.
Le monde a besoin de personnes comme toi, qui osent parler de tabous, de défis, d’atypie, de résilience.
Je te souhaite bonne continuation avec Atypiquement parfaite. Et je souhaite que nous ayons à nouveau l’occasion d’échanger autour d’un bon repas.
Moi aussi Larissa! Moi aussi.
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