Du 7 au 13 mai 2018 a lieu la Semaine nationale de la Santé mentale. Je me sens directement interpelée cette année puisque j’ai maintenant une tribune pour en parler. Le blogue m’a permis de m’ouvrir d’avantage sur le sujet. Je ne me cache plus pour le dire. Je fais partie des quelques 20% de Québécois vivant avec des problèmes de santé mentale.
Ce n’est pas nouveau
Comme je l’ai mentionné à plusieurs reprises depuis l’ouverture du blogue, au cours des dernières années, j’ai souffert d’anxiété. Avant ça, l’anxiété a toujours fait partie de moi, mais j’ai commencé à en souffrir le jour où c’est devenu tellement grand que ça a pris le contrôle sur ma vie. C’est ça un problème de santé mentale au fond. C’est quand ça devient tellement intense, que ce n’est plus quelque chose qu’on peut oublier.
Certains jours, je me lève et je suis déjà anxieuse. Ces jours-là, souvent, je ne sais même pas pourquoi je me sens comme ça. Déjà au réveil, j’ai besoin de prendre un temps pour respirer. Parfois ça aide, d’autres fois ça ne fait rien. Donc, il y a quelques mois, j’ai pris la décision de consulter. Ça faisait trop longtemps que je me sentais comme ça, au quotidien.
Tous ne comprennent pas
Quand je rencontre des gens et que je leur mentionne que je vis avec l’anxiété, ils me disent parfois qu’eux aussi en vivent « des fois » et me disent que de faire de l’exercice ou méditer, ça aide. Et ils ont raison! C’est vrai que ça fait du bien de faire de l’exercice, mais ce n’est pas tout. Selon la journée, ça peut arriver que leur commentaire me dérange profondément ou qu’il ne me perturbe pas du tout. Ça dépend. Parce que c’est ça aussi la maladie mentale, comme pour tout, il y a des jours où c’est très fort et d’autres où ce n’est pas le cas. Ce genre de commentaire me fait souvent sentir encore plus inadéquate, même si ce n’était pas leur intention. Avec du recul, je réalise qu’eux ne savent probablement pas ce que c’est de vivre avec de l’anxiété au quotidien.
Dans la vie de tous les jours, tout le monde vit un peu d’anxiété. Le stress du trafic, le patron qui n’est pas satisfait, un client fâché, un enfant qui fait une crise à l’épicerie, trop de bruit dans le métro, trop de monde dans l’autobus. Toutes des choses qui nous sortent de notre zone de confort et qui nous rendent tendus.
Généralement, une personne va être capable de réduire l’effet de ces stress-là en faisant de l’exercice ou en prenant une pause. Pour plusieurs personnes souffrant d’anxiété, prendre une pause ne diminue que peu ou pas le niveau de stress. À la fin de la journée, ou même parfois au début de la journée, le niveau de stress est si haut que c’est la crise. C’est pour ça qu’on parle de « souffrir » de problèmes de santé mentale. Ce n’est pas juste un inconfort qui arrive une fois, c’est un inconfort de tous les instants.
La médication est parfois nécessaire
J’ai pris la décision de prendre de la médication, parce que malgré tous mes efforts et malgré le fait que j’en parle ouvertement avec mon entourage, respirer n’était plus du tout suffisant. Ce n’a pas été une décision facile. C’est venu après plusieurs tentatives d’y arriver par moi-même, avec des trucs que je connaissais. Je me suis rendue compte que j’avais dépassé le stade où les techniques m’aideraient à passer à travers mes journées.
Analogie
Si je voulais vous expliquer en mots simples comment je me sentais au moment où j’ai décidé de prendre la médication, je pourrais faire une analogie. Imaginez que vous regardez un film de suspense. Vous savez que lorsqu’une certaine ambiance s’installe, il va y avoir un événement dérangeant qui va se produire. C’est toujours comme ça dans ce genre de film. La musique commence, vous le savez que vous allez faire un saut ou avoir peur ou … Bref, vous êtes en attente d’un événement quelconque. Pendant un mois, ma vie était comme un film de suspense. J’avais ce petit pincement dans l’estomac et le cerveau en alerte exactement comme lorsque les premières notes de musique jouent. Le problème, c’est que ce n’était pas un film et il n’y avait jamais de surprise.
Toute la journée, tous les jours, pendant environ un mois, j’étais en attente, du matin au soir, du soir au matin. L’estomac serré, prête à sursauter. Mon corps m’a épuisée. Rien n’aidait dans mes trucs contre l’anxiété. Et je ne pouvais pas non plus dire ce qui me rendait comme ça. Je suis allée voir mon médecin pour avoir une prescription parce que je n’en pouvais plus. Quelques jours après le début de la médication, le sentiment s’est atténué, puis il est parti. À ce moment-là, je ne souffrais plus d’un problème de santé mentale, je pouvais vivre avec. Je pouvais aussi commencer à utiliser plus efficacement les trucs du quotidien comme faire de l’exercice et méditer, parce que j’avais plus d’énergie pour le faire et que mon cerveau n’était pas submergé par l’angoisse.
De zéro à 100 en une fraction de seconde
Certains jours, je me sens bien, surtout depuis que j’ai commencé la médication. Tout a l’air « normal », tout est paisible. Je ne sens pas mon stress ou mon niveau d’anxiété monter, de toute la journée. Et quelque chose d’aussi anodin que de chercher les œufs pour faire un gâteau et se rendre compte qu’il n’en reste plus peut devenir une catastrophe nationale. Je passe du stade « oh non! y’a pas d’œufs » à « Je me suis fait voler ma maison pis le gars est parti avec mes œufs, appelez la police au plus vite pis l’ambulance pour moi parce que je suis en crise! » ou « Je suis la pire personne au monde, je ne me rappelle jamais d’écrire ce qu’il manque dans le réfrigérateur, je suis sûre que mes enfants vont m’en vouloir pour le restant de leur jour, appelez la DPJ tout de suite, je suis la pire mère pour eux, je ne peux même pas leur faire de muffins » en une fraction de seconde, sans avertissement. Dans les dernières années, ça m’est arrivé plusieurs fois d’avoir des épisodes aussi intenses. Depuis que je prends de la médication, ces épisodes sont beaucoup moins fréquents.
Encore tabou la santé mentale
Malgré le fait qu’il y ait près de 20% de la population qui vive avec, la santé mentale est encore tabou. On n’ose pas en parler, pour différentes raisons. Parce que c’est un signe de faiblesse, parce qu’on a peur du jugement, parce que c’est dans notre tête, parce que c’est invisible, parce que ça va passer, parce qu’on a juste à faire plus attention, parce que c’est de notre faute, parce que ci, parce que ça.
On devrait s’ouvrir aux autres, comme on parle de notre diabète ou notre mal de tête. Ce sont des maladies aussi, mais avec un impact différent. Comme d’autres maladies, on doit les soigner pour arrêter d’en souffrir. Puis commencer à vivre avec et mettre en place des trucs qui nous aident vraiment.
Trouvez le moyen qui vous convient
Pour soigner les problèmes de santé mentale, il faut simplement faire un premier pas et s’ouvrir aux autres. C’est ce pas là qui est le plus difficile à faire. Par la suite, aller consulter. Les moyens à mettre en place seront déterminés au cas par cas. Chacun est différent. Ce n’est pas tout le monde qui a besoin de médicament et ce n’est pas parce que vous parlez à votre médecin que vous serez automatiquement dirigé vers cette avenue. Les professionnels de la santé sont là pour guider vers ce qui est le mieux pour nous. Si votre médecin n’est pas ouvert à vous aider d’une façon avec laquelle vous vous sentez à l’aise, aller voir un autre professionnel (psychologue, psychothérapeute), il existe plusieurs intervenants qui peuvent vous guider d’une façon qui vous respecte. C’est essentiel d’être confortable avec le choix de traitement pour que ça aille vraiment mieux.
Connaissez-vous des gens qui souffre de problèmes de santé mentale? En souffrez-vous vous-même? Cette semaine est peut-être un bon moment pour ouvrir une discussion à cœur ouvert, sans jugement, juste pour en apprendre plus sur l’autre. Comme ça, peut-être, vous arrêterez de souffrir pour plutôt apprendre à vivre avec.
Soyez doux avec vous!
Pour retrouver les billets où je parles de mon anxiété et de moyens que j’ai mis en place pour me sentir mieux, vous pouvez cliquer ici et là.
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